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ORDONNANCE 2019 N° 361

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DOSSIER N° 113/2019 RC 119/2019
ORDONNANCE N° 361

 

 

 

L’an deux mil dix-neuf et le vingt-deux mai ;
Nous, Mme RAMANANDRAITSIORY Miharimalala, Président du Tribunal de Commerce d’Antananarivo, siégeant au Palais de Justice de ladite ville en son audience publique des référés commerciaux,
Assistée de Me RATSIMBAZAFY Christiane, GREFFIER
Oui le requérant en ses demandes, fins et conclusions,
Oui le requis en ses défenses, fins et moyens,
Tous droits et moyens des parties expressément réservés ;
FAITS ET PROCEDURE
Par exploit d’huissier en date du 19 février 2019, à la requête de Monsieur RANDRIANASOLO Bowan, demeurant à Mananjara lot II N 76 Antananarivo, ayant pour conseil Me Eléonore RAKOTONATOANDRO RASOANOROMANANA, assignation à bref délai fut servie à Monsieur TONY GLENN BOWAN, demeurant à Mahamasina lot III F 51 Antananarivo, ayant pour conseil Me Joël RAKOTONDRAZAKA d’avoir à comparaitre devant le tribunal de référé à bref délai de céans pour s’entendre ordonner la défense à quiconque d’entrer la nuit dans l’atelier de la Société RANDRIANASOLO BOWAN et FILS IMPRIMERIE DE MAHAMASINA SARL ainsi que la cessation des travaux d’imprimerie effectués par le défendeur dans les lieux;
Aux motifs de sa demande, par le truchement de son conseil Me Eléonore RAKOTONATOANDRO RASOANOROMANANA, le requérant soutient en substance qu’il y a urgence à faire cesser les travaux entrepris par le requis pendant la nuit au sein de l’imprimerie puisque les associés sont en litige, conduisant même à une demande de dissolution déposée devant le tribunal de commerce qui l’a prononcée le 21 février 2019 ;
Qu’ainsi, pour des raisons de sécurité puisque la société n’a pas d’horaire nocturne, la cessation de ces agissements du défendeur s’avère impérieux ;
Il prétend également que ces faits nuisent aux intérêts sociaux, particulièrement en perturbant le processus de liquidation car le défendeur agit de manière clandestine pour ses propres intérêts en tant qu’associé à 50% dans la Société, ce pourquoi, il maintient sa demande de plus fort à la suite de la dissolution judiciaire prononcée ;
En réplique à l’exception d’irrecevabilité soulevée par le conseil du défendeur lors de ses plaidoiries, le requérant conclut au débouté de la demande dans la mesure où les erreurs matérielles commises par l’huissier lors de la signification de l’exploit introductif n’ont causé aucun grief au défendeur qui a pu se présenter à l’audience et invoque ainsi l’application de l’article 18 alinéa 2 du code de procédure civile ;
En défense, par l’organe de son conseil Me Joël RAKOTONDRAZAKA, le défendeur soulève in limine litis l’irrecevabilité de l’action, d’une part en contestant la régularité de l’assignation, en raison de la qualité de la personne qui l’a reçue et qui est un employé et non l’employeur du requis comme il est mentionné dans l’acte ;
D’autre part, il soutient que le requérant n’a pas qualité pour agir en son nom personnel car il agit pour le compte d’une personne morale ;
Sur le fond, il conteste l’initiative unilatérale du requérant qui, bien qu’en tant que gérant, met en péril les intérêts de la société et des employés ;
Il estime qu’une telle fermeture, sans liquidation judiciaire, doit être décidée en assemblée et cette mesure de fermeture unilatérale n’est donc pas opposable à l’associé à 50% qu’est le requis ;
Il argue qu’en tant qu’associé, il a un droit d’accès libre dans la société et dispose d’un droit de regard, il ne fait ainsi qu’exercer son droit d’aller et venir au siège de la société, aussi aucune urgence n’est caractérisée ;
MOTIVATION:
I-En la forme,
Sur les exceptions de nullité de l’assignation et de fin de non-recevoir :
L’article 18 du code de procédure civile dispose que « aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public » ;
L’erreur sur la qualité de la personne qui a reçu l’assignation au domicile du requis n’a pas préjudicié le requis qui a pu se présenter et se défendre, outre que l’acte mentionne sans erreur l’identité du requis et son adresse, faits non contestés par le requis lui-même ;
Il n’y a donc aucun grief rapporté, il y a lieu de rejeter l’exception de nullité soulevée ;
Quant à la fin de non-recevoir pour défaut de qualité pour agir, en tant que gérant, le requérant a qualité pour agir en représentation de la Société et dans l’intérêt de celle-ci d’une part ;
D’autre part, il a qualité pour agir pour défendre ses intérêts contre les agissements de l’autre associé, ce qui implique que l’exception est mal fondée et la demande est recevable ;
II-Au fond,
L’article 15 du statut de la société détermine le pouvoir du gérant qu’est le requérant et qui peut notamment agir au nom de la Société en toutes circonstances, suivre toutes actions judiciaires, représenter la société dans toutes les opérations de faillite ou liquidation judiciaire ou amiable, ce qui ne rentre pas en contradiction avec les dispositions de l’article 348 de la loi 2003-036 sur les sociétés en ces termes: « dans les rapports entre associés et en l’absence de la détermination de ses pouvoirs par les statuts, le gérant peut faire tous les actes de gestion dans l’intérêt de la société » ;
Ainsi, interdire tout accès pour effectuer des travaux d’imprimerie au sein de la Société au-delà des heures de travail adoptées dans le règlement intérieur revient à gérer la société et protéger ses intérêts et rentre ainsi dans le cadre de la fonction et des attributions du gérant ;
Or, il ressort du procès-verbal d’huissier du 14 février 2019 que le requis, interpellé, a reconnu pénétrer dans les ateliers pendant la nuit malgré que ce soit interdit et a répondu même que la société avait pour pratique de travailler la nuit ;
Toutefois, concernant le requis, se prévaloir de l’horaire de travail du règlement intérieur n’est pas pertinent en ce qu’il n’est pas membre du personnel d’une part, et d’autre part, il avoue accéder dans les lieux la nuit, ce qui ne peut que compromettre la sécurité et la bonne gestion de la société ;
Il importe de souligner par ailleurs que les articles 364 et suivants de la même loi évoquent les droits d’un associé qui sont limités à un droit d’information permanent sur les affaires sociales, un droit de communication, un droit aux dividendes ;
Ces droits de regard permanent sur le fonctionnement et la gestion de la société ne lui confèrent toutefois pas un droit d’accès libre ou d’aller et venir à tout moment dans les lieux car le droit de se faire communiquer des documents pour suivre la vie sociale s’exerce autrement qu’en pénétrant dans les lieux pendant la nuit ;
Le tribunal estime ainsi qu’il y a urgence pour faire cesser cet accès clandestin du requis dans l’atelier ainsi que son utilisation des biens de la société pendant la nuit, il y a lieu de faire droit à la demande ;
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé à bref délai commercial, en premier ressort;
Vu l’Ordonnance d’autorisation d’assigner à bref délai n°081 du 18 février 2019 ;
Déclarons les exceptions de nullité de l’assignation ainsi que la fin de non-recevoir soulevées par Monsieur BOWAN TONY GLENN recevables mais mal fondées ;
Déclarons ainsi la demande principale formulée par Monsieur RANDRIANASOLO Bowan fondée ;
Interdisons à Monsieur BOWAN TONY GLENN d’accéder la nuit dans l’atelier de la Société RANDRIANASOLO BOWAN et FILS IMPRIMERIE DE MAHAMASINA SARL et ordonnons la cessation des travaux d’imprimerie effectués par Monsieur BOWAN TONY GLENN dans les lieux ;
Laissons les frais et dépens à la charge de Monsieur BOWAN TONY GLENN, dont distraction au profit de Me Eléonore RAKOTONATOANDRO RASOANOROMANANA, Avocat aux offres de droit;
Ainsi ordonné et signé après lecture par NOUS et le GREFFIER.-