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ORDONNANCE N° 491

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DOSSIER N° 201-210/2018 RC 226-209/2018
ORDONNANCE N° 491

 

 

 

L’an deux mil dix-huit et le vingt-deux août ;
Nous, Mme RAKOTOARISON Rindra Nirina, Juge du Tribunal de Commerce d’Antananarivo, siégeant au Palais de Justice de ladite ville en son audience publique des référés commerciaux,
Assistée de Me RATSIMBAZAFY Christiane, GREFFIER
Oui le requérant en ses demandes, fins et conclusions,
Oui les requis en leurs défenses, fins et moyens,
Tous droits et moyens des parties expressément réservés ;

FAITS ET PROCEDURES :
Par exploit d’huissier en date du 20 mars 2017, à la requête de monsieur CHAVAROC Jean Rémi, demeurant au lot II H 36 D Soavimasoandro Antananarivo, assignation a été servie à monsieur TSARATOMBO Harold liquidateur de la société AZ EXPORT Sarl exerçant au lot IV immeuble Santa Antanimena d’avoir à comparaître devant le tribunal de commerce de céans pour entendre :
• Ordonner l’expertise contradictoire de gestion de la société AZ’EXPORT sur la durée de la société et sur la totalité des opérations.
Aux motifs de sa demande Mr CHAVAROC Jean Rémi fait soutenir:
Qu’il est associé à 33% de la société AZ’EXPORT,
Qu’il a déjà demandé une expertise de gestion de ladite société, laquelle fût accordée en 1ère instance, refusée en appel et accordée en cassation puis refusée par rétractation trois mois après sans motif ;
Que le début d’expertise réalisé sur les sauvegardes informatiques avant la rétractation par la cour suprême fait apparaitre des détournements et une comptabilité falsifiée ;
Que Monsieur Vidal LAMOUROUX refuse de se conformer à l’arrêt de la cour suprême et de transmettre les pièces à l’expert n’a pas permis de calculer les montants détournés sur ses comptes ;
Qu’en effet pour les exercices 2012, 2013, 2014, ce dernier se dispense de certification des comptes et de présentation de bilan par le commissaire aux comptes.
Que pendant ces exercices les pertes ont curieusement augmentées de manière exponentielle alors que la société n’avait jamais affiché de perte depuis sa création alors qu’en 2013 et 2015 la société a pu bénéficier deux emprunts auprès de la BNI or les pertes déclarées sont équivalentes à un an de chiffre d’affaire,
Que la certification de l’exercice 2015 a été faite hors nomination de commissaire au compte et sans présentation légale en AG,
Que des travaux ont été réalisés et facturés pour des clients par la société STRUCTURE avec les moyens et les personnels de l’AZ’EXPORT sans aucune convention ;
Que la liquidation de la société a débuté en juillet 2015 dont le liquidateur est monsieur Tsaratombo Harold,

Que la demande de transmission des pièces et les questions posées auprès de ce dernier sont restées vaines,
Que cependant l’arrêt reconnait son droit d’exiger la transparence sur les opérations de gestion,
Qu’en AG, juillet 2017, le liquidateur a présenté le bilan 2016 sans fournir les pièces justificatives demandées,
Qu’ainsi le liquidateur se comporte comme un complice,
Qu’au vu des illégalités, il demande l’expertise de gestion pour étudier les responsabilités décisionnelles sur certaines opérations ;
Que l’expertise doit se focaliser principalement sur :
– La disparition des règlements clients non déclarés sur les comptes particuliers de Mr Vidal et parfois leurs réapparitions dans un faux compte courant qui n’a fait l’objet d’aucune convention,
– L’implication de la société STRUCTURE.
Que par rapport à l’attitude de monsieur Tsaratombo et la suspicion qui s’ensuit quant à sa nomination, il demande que l’expert nommé soit un cabinet comptable de classe internationale avec audit interne donc capable de résister à toute sollicitation.
Monsieur TSARATOMBO Harold par le biais de son conseil Me RAJERY a conclu que conformément à l’article 246 de la loi 2003-036, sa mission et son pouvoir en tant que liquidateur sont circonscrits aux actes de la liquidation, or une expertise de gestion « sur la durée de la société, sur la totalité des opérations » ne relève pas des opérations de liquidation. En effet, il n’a pas légalement qualité à représenter la société dans le cadre de la présente action.
Par conséquent, il demande la mise en cause des autres associés par les soins de CHAVAROC Jean Rémi Victor.

Par requête en intervention volontaire en date du 04 avril 2018, Monsieur VIDAL LAMOUROUX Bruno Joël, demeurant au lot II M 32 A Ambatomitsangana Androhibe Antananarivo et la société EURO VENTURE LIMITED, ayant son siège social au Coporate and Chancery Chambers 2nd Floor, Barkly Wharf le Caudan Waterfront Port Louis Mauritius, représentée par monsieur Zakazo RANAIVOSON ayant pour conseils Maîtres Hanta et Koto RADILOFE avocats au barreau de Madagascar exposent :
Qu’ils détiennent 67% du capital social de la société AZ’EXPORT,
Que suite aux dissensions graves opposants les associés, ils ont demandé la dissolution de la société,
Que lors de cette procédure de dissolution Mr CHAVAROC Jean Rémi a demandé à titre reconventionnel une expertise de gestion de la société depuis sa création,
Que par arrêt n°58 du 09 juillet 2015 la chambre commerciale de la cour d’appel d’Antananarivo a rejeté la demande d’expertise de gestion et prononcé la dissolution de la société AZ’EXPORT,
Qu’ainsi en leur qualité d’associés de la société AZ’EXPORT, ils sont fondés à intervenir dans la présente procédure.
Par conclusion en date du 27 avril 2018, Bruno Vidal LAMOUROUX et la société EURO VENTURE LIMITED par l’intermédiaire de ses conseils invoquent l’irrecevabilité de la demande de Monsieur CHAVAROC Jean Rémi en arguant :
Que sieur CHAVAROC n’a pas formé de pourvoi en cassation de l’arrêt n°58 précité,
Que par l’effet de l’autorité de la chose jugée, il est irrecevable à formuler la même demande d’expertise de gestion.
Monsieur CHAVAROC Jean Rémi par le truchement de ses conseils Maîtres RANARIVELO Andrianiaina & RANDRIANJAFINIONY réplique que son droit prévu par l’article 178 de la loi 2003-036 sur les sociétés n’est assorti d’aucun délai.

Que l’expertise de gestion s’explique par le souci de manque de transparence et d’éventuels détournements de fond au sein d’une société.
Dans ses conclusions responsives Bruno Vidal LAMOUROUX et La société Euro Venture Limited via leurs conseils persistent et ajoutent :
Que par l’exécution du jugement n°458/IS3 du 20/11/2012 confirmé par l’arrêt n°1074 du 28 juin 2013, les parts sociales du demandeur furent saisies et vendues aux enchères publiques le 09 mai 2018,
Qu’en effet CHAVAROC Jean Rémi n’a plus la qualité à demander une expertise de gestion,
Qu’en outre étant un étranger à la société il ne peut se prévaloir d’un quelconque intérêt à connaître les détails d’opérations de gestion ; en application de l’article 2 du CPCM sa demande est irrecevable.
Le requérant via ses conseils rétorque que sa prétention est fondée par sa qualité d’associé au moment de l’introduction de sa demande et son intérêt se justifie par le souci de mauvaise gestion et manque de transparence au sein de la société surtout sur le plan financier.

MOTIFS :
La requête en intervention volontaire a été formulée conformément aux dispositions des articles 359 et suivants du code de procédure civile donc il y a lieu de la recevoir et de déclarer Monsieur Bruno Vidal LAMOUROUX et la société Euro Venture Limited régulièrement installés dans la présente procédure au rang des défendeurs.
Monsieur CHAVAROC Jean Rémi reconnait qu’il a déjà formulé la même demande d’expertise de gestion auparavant.
L’article 307 de la loi n° 66-003 du 2 juillet 1966 relative à la théorie générale des obligations prévoit :
« Pour que l’autorité de la chose jugée puisse être invoquée contre la recevabilité de la nouvelle demande en justice, il faut :
1° qu’il y ait, entre les deux demandes, identité d’objet c’est-à-dire que le même droit soit invoqué sur la même chose ou en vertu du même fait ;
2° qu’il y ait identité de cause, c’est-à-dire que la nature juridique du droit invoqué soit la même quant à sa qualification ;
3° qu’il y ait identité des parties, c’est-à-dire qu’elles figurent dans les deux instances en la même qualité juridique. »
Dans le cas d’espèce, il ressort de l’arrêt n°58 du 09 juillet 2015 que la chambre commerciale de la cour d’appel d’Antananarivo a déjà rejetée la demande d’expertise de gestion de la société AZ’EXPORT formulée par monsieur CHAVAROC Jean Rémi basée sur l’article 178 de la loi 2003-036 ;
L’objet et la cause de la présente demande d’expertise de gestion sont les mêmes que ceux invoqués et débattus dans ledit arrêt à savoir le manque de transparence et l’application de l’article 178 précité ; il en est également de la qualité des parties.
Par conséquent, l’autorité de la chose jugée invoquée se trouve fondée qu’il y a lieu de déclarer la demande d’expertise de gestion irrecevable.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement contradictoirement en matière de référé commercial et en premier ressort ;
Déclarons la requête en intervention volontaire recevable ;
Déclarons Monsieur Vidal LAMOUROUX et la société Euro Venture Limited régulièrement installés dans la présente procédure au rang des défendeurs,
Déclarons l’action de Monsieur CHAVAROC Jean Rémi irrecevable.
Laissons les frais et dépens de l’instance à sa charge.
Ainsi ordonné et signé après lecture par NOUS et le GREFFIER.-