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JUGEMENT N° 282-19-C

DOSSIER N° : 356/19 RC :356/19
NATURE DU JUGEMENT :CONTRADICTOIRE
JUGEMENT N° :282-19-C DU 25/10/2019
PREMIER APPEL DE LA CAUSE : 25/04/2019
DELAI DE TRAITEMENT : __0 Année(s) 6 Mois 9 Jour(s)
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Le Tribunal de Commerce d’Antananarivo, à l’audience publique
ordinaire du vendredi vingt-cinq octobre deux mille dix-neuf , salle (5),où siégeaient :
Madame/ Monsieur, RAFALIMANANA Mahamanina – PRESIDENT
En présence de :
Mme/ Mr GASSARD Afick – ASSESSEURRAKOTOMANGA Alisoa – ASSESSEUR
Assisté(e) de Me RANDRIAMAHERISOA Solomon – GREFFIER
Il a été rendu le Jugement suivant :ENTRE :HERISOA Nirina , ayant son siège à Lot C 53 Cités des portes
Ankadivato , ayant pour Conseil Maître : RAHARIFIDY Esther
Requérant(e), comparant et concluant.
ET :
La SIPEM Banque , ayant son siège à Lot A 216 Andavamamba
Requis(e), comparant et concluant.
LE TRIBUNAL
Vu toutes les pièces du dossier :
Ouï la requérante en ses demandes, ses fins et conclusions ;
Ouï le(la)(les) requis(e)(es) en ses moyens, fins et conclusions;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Par exploit d’huissier en date du 15 Avril 2019, dame Herisoa Nirina, ayant pour Conseils Mes Raharifidy, Avocats au Barreau de Madagascar, a assigné devant le Tribunal de commerce de céans la Sipem Banque, représentée par sieur Rakotondramaro Andrianiaina Jerry Christophe, chef d’agence pour s’entendre :

  • Octroyer un délai de grâce d’une année à dame Herisoa Nirina pour le paiement de la somme de 22 855 978,41 Ariary ;
  • Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant toutes voies de recours ;
  • Condamner aux entiers frais et dépens de l’instance dont distraction au profit de Mes Raharifidy, Avocats aux offres de droit ;

Aux motifs de sa requête, la requérante expose ce qui suit :

Attendu que suivant convention de prêt n°50176 du 12 Juillet 2018, dame Herisoa Nirina a emprunté auprès de la Sipem Banque la somme de 22 000 000 Ariary, qui, avec les intérêts, s’élève à 29 326 000 Ariary, et qui était à rembourser sur 18 mois à raison de 1 629 222 Ariary par mois ;

Que pour l’octroi de ce prêt, la SIPEM Banque a exigé une garantie matérielle et que dame Herisoa Nirina a dès lors, donné en gage ses deux véhicules, dont la valeur est nettement supérieure au prêt consenti :

  • Véhicule n°3279 TBC, marque Hyundai, dans la série du type 045571, type NM81WP, année de fabrication 2002, genre VP Occasion, puissance 10CV, charge utile 890 ;
  • Véhicule n°7563 TBE, marque Mercedes Sprinter, dans la série du type 903662IR786265, type 313 CDI, année de fabrication 2005 genre TCP, véhicule occasion, puissance 9CV, charge utile 1890 ;

Attendu que le véhicule Sprinter est non seulement objet de gage, mais est surtout le moyen de remboursement de l’emprunt en étant utilisé depuis et jusqu’à maintenant comme transport collectif reliant Tana – Ivato, et dont la recette journalière est amplement suffisante pour couvrir le remboursement de la Sipem Banque à chaque échéance de paiement ;

Qu’à partir du premier mois de remboursement, le 09 Août 2018 jusqu’au 16 Novembre 2018, soit quatre mois successifs, dame Herisoa Nirina n’a pas eu de problème de paiement, mais, vers la fin du mois de Novembre 2018, le véhicule a présenté des pannes fréquentes de moteur ;

Attendu que durant le véhicule s’est trouvé immobilisé jusqu’au mois de Février 2019, entrainant un retard de paiement ;

Que le 21 Janvier 2019, la Sipem Banque a adressé à dame Herisoa Nirina une lettre de mise en demeure, à laquelle elle a immédiatement répondu par mail, exposant cette panne de véhicule ;

Que pour confirmation, son mari qui est caution solidaire dans la convention de prêt, s’est déplacé en personne chez Sipem Banque pour s’entretenir avec le chef d’agence ;

Attendu que le chef d’agence s’est déplacé sur terrain pour constater de visu l’état du véhicule, a reconnu les faits et a même avancé des solutions ;

Que cependant, grande fut la surprise de dame Herisoa Nirina lorsque la Sipem Banque a envoyé un Huissier de Justice le 1er Avril 2019 vers 17h pour saisir le véhicule Sprinter à Andohatapenaka, et a donné un délai de huit jours pour rembourser la totalité des dettes restantes, soit 22 855 978,41 Ariary sinon elle va procéder à la vente aux enchères publiques de la voiture prévue le 26 Avril 2019 ;

Que la lettre de mise en demeure mentionne que les débiteurs sont introuvables et intouchables alors qu’ils ont un domicile fixe, ont répondu par mail à la Banque et ont accompagné le chef d’agence à leur domicile ;

Attendu que la Sipem Banque a attendu le premier jour de remise en circulation du véhicule pour procéder immédiatement à une saisie ; Qu’il y a de ce fait mauvaise foi de la Sipem Banque ;

Attendu que la requérante n’a jamais contesté sa créance, et les impayés des quelques échéances ne résultent nullement d’une mauvaise foi de sa part méritant par là le bénéfice de l’article 52 de la loi sur la théorie générale des obligations ;

Attendu enfin que le délai de grâce d’une année ne pourrait pas nuire à la Sipem Banque car le délai de remboursement du prêt est de 18 mois, et celui-ci se trouverait raccourci à 12 mois en cas de délai de grâce ; ce qui ne peut que bénéficier à la Sipem Banque ;

En réponse, la Sipem Banque représentée par Rarivoarison Ravaka Henintsoa soutient ce qui suit :

Attendu que par convention de prêt n°50176 en date du 12 Juillet 2018, dame Herisoa Nirina et sieur Marimbeloson William Ladislas ont contracté auprès de la Sipem Banque un prêt d’un montant de 22 000 000 Ariary ;

Qu’il a été convenu que le remboursement se fera par mensualité constante de 1 629 222,20 Ariary pendant 18 mois ;

Que le dernier remboursement des requérantes remonte au mois de Décembre 2018 malgré les diverses promesses ;

Qu’une lettre de mise en demeure en date du 21 Janvier 2019 leur a été adressée mais celle-ci n’a pu être servie à personne du fait qu’ils ne sont jamais joignables au domicile conventionnel ;

Que malgré toutes les relances et les réclamations faites à leur encontre, ils n’ont point daigné payer leur dette, ce qui compte actuellement 4mois de retard ;

Que face à l’abstention de dame Herisoa Nirina et sieur Marimbeloson William Ladislas de régulariser leur retard de paiement , la Sipem Banque a procédé à la saisie du véhicule Sprinter 7563 TBE nanti à son profit ;

Que le jour de la saisie, le véhicule était en service reliant Tanà à Ivato ;

Attendu par là que la mauvaise foi des débiteurs est prouvée en ce qu’ils s’abstiennent volontairement de rembourser leur dette ;

Qu’en vertu de l’article 123 de la LTGO, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi entre les parties et elles ne sont révocables que par leur consentement mutuel ;

Qu’en vertu également de l’article 128 de la même loi, le contrat conserve force obligatoire même si des circonstances exceptionnelles ont rompu l’équivalence des prestations ;

Attendu par ailleurs que l’entretien et la maintenance des véhicules font partie des obligations du propriétaire, et cela n’enlève en rien à leur responsabilité vis-à-vis du créancier quant au paiement de leur dette ;

Attendu enfin que dame Herisoa Nirina et sieur Marimbeloson William Ladislas demandent en parallèle la discontinuation de poursuite relative à la vente aux enchères du véhicule Sprinter 7563 TBE afin d’empêcher la SIPEM Banque de se faire droit sur les garanties affectées au paiement de sa créance ;

Que l’article 52 de la LTGO conditionne l’octroi du délai de grâce à la bonne foi du débiteur et celui-ci n’est octroyée qu’exceptionnellement ; qu’accorder un tel délai nuirait gravement à la comptabilité déjà déficitaire de la Sipem Banque ;

Qu’il y a lieu de déclarer la décision à intervenir exécutoire sur minute ;

DISCUSSION

En la forme

Les demandes ont été introduites conformément aux dispositions  du Code de Procédure Civile, elles sont de ce fait régulières et recevables ;

Au fond

  • Sur le délai de grâce

En vertu de l’article 52 de la loi sur la théorie générale des obligations : « Les juges peuvent accorder exceptionnellement au débiteur des délais qui ne pourront au total dépasser un an » ;

Encore faut il que le débiteur soit de bonne foi et qu’il présente une offre satisfactoire de paiement c’est-à-dire une offre sérieuse ;

En l’espèce, la requérante martèle qu’elle entend purger sa dette grâce aux recettes du véhicule Sprinter 7563 TBE ;

Or, il se trouve que ledit véhicule a été saisi ; qu’un procès est en cours concernant sa restitution au propriétaire ;

Que l’incertitude quant au moyen de paiement et au délai d’exécution enlève à l’offre faite par la requérante de payer en 12 mois tout caractère sérieux ;

Dès lors, la demande de délai de grâce ne peut qu’être rejetée ;

  • Sur l’exécution sur minute

Dans la présente instance, l’extrême urgence n’est point prouvée de telle sorte que la demande d’exécution sur minute ne saurait être accueillie favorablement ;

D’ailleurs , la demande de délai de grâce ayant déjà été rejetée.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort :

  • Reçoit l’assignation ;
  • Déboute la requérante de sa demande de délai de grâce ;
  • Dit qu’il n’y a pas lieu à exécution sur minute ;
  • Met les frais à la charge de la requérante.

Ainsi jugé et prononcé en audience publique les jour, mois et an que dessus, et la minute du présent jugement a été signée, après lecture, par le Président et le greffier./.