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JUGEMENT N° 122C-19

DOSSIER N° : 9/19 RC :09/19
NATURE DU JUGEMENT :CONTRADICTOIRE
JUGEMENT N° :122C-19 DU 17/05/2019
PREMIER APPEL DE LA CAUSE : 18/01/2019
DELAI DE TRAITEMENT : __0 Année(s) 4 Mois 3 Jour(s)
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Le Tribunal de Commerce d’Antananarivo, à l’audience publique ordinaire du vendredi dix-sept mai deux mille dix-neuf , salle 7, où siégeaient :
Madame/ Monsieur, RAKOTOARIMANANA Patricia Danielle – PRESIDENT
En présence de : Mme/ Mr ANDRIAMIALISON Simon – ASSESSEUR
RAJAONARIVELO Heritiana – ASSESSEUR
Assisté(e) de Me RAHARISON Rova – GREFFIER
Il a été rendu le Jugement suivant :
ENTRE :
RAFALIMANANA Zoelinivo , ayant son siège à Lot II A 119 JA Soavimbahoaka Antananarivo , ayant pour Conseil Maître : ANDRIANARIHAJA Tiana Dinamahefa
Requérant(e), comparant et concluant.
ET :
RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole , ayant son siège à Lot II P 47 Ter Besarety Antananarivo
Requis(e), comparant et concluant.
LE TRIBUNAL
Vu toutes les pièces du dossier :
Ouï la requérante en ses demandes, ses fins et conclusions ;
Ouï le(la)(les) requis(e)(es) en ses moyens, fins et conclusions;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EXPOSE DU LITIGE :
Par assignation introductive d’instance en date du 28 Décembre 2018, dame RAFALIMANANA Zoelinivo ayant pour conseil Me ANDRIANARIHAJA Dinamahefa Tina, avocat à la cour, a attrait dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole devant le tribunal de céans pour s’entendre :
l Constater les non paiements et les paiements irréguliers de loyers de dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole ;
l Ordonner la résiliation du bail commercial liant les parties ;
l Ordonner l’expulsion de dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole et de tous occupants de son chef du box par elle loué à la maison sise au lot II P 47 TER Besarety sous astreinte de 100 000 Ar par jour de retard à compter de la date où la décision à venir sera exécutoire ;
l Ordonner la condamnation de dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole à lui payer la somme de 10 350 000 ariary représentant les arriérés de loyers échus jusqu’au mois de novembre 2018 outre les loyers à échoir jusqu’au départ définitif du box loué ;
l Ordonner la condamnation de dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole à lui payer la somme de 6 000 000 ariary à titre de dommages-intérêts ;
l Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;
l Laisser les frais et dépens à la charge de la requise dont distraction au profit de Me ANDRIANARIHAJA Dinamahefa Tina ;
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Au soutien de sa demande, Dame RAFALIMANANA Zoelinivo expose par le biais de son conseil qu’elle est la légitime propriétaire de la maison sise au lot II P 47 TER Besarety en tant que seule héritière des feux époux RAFALIMANANA Philippe/RAHANIRAKAMALALA Hermine ;
Qu’en vertu du contrat de bail du 23 juin 2011, dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole a loué le rez de chaussée de la maison au prix de 400 000 Ar ;
Que par lettre du 7 novembre 2017, dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole s’est engagée à quitter les lieux loués en cas de loyers impayés ;
Qu’elle a eu l’autorisation de changer les lieux loués en usage commercial suivant sommations en dates du 12 et du 16 puis du 20 novembre 2018 ;
Que depuis le mois de février 2015, dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole n’a plus honoré les loyers échus de façon régulière, et les impayées accumulés ont atteint 10 150 000 Ar, montant reconnu par la locataire dans la lettre du 11 octobre 2018 ;
Que de cette somme, elle n’a payé que 200 000 Ar malgré son engagement de payer le reliquat au plus tard le 31 octobre 2018 ;
Que toutes les démarches amiables pour recouvrer ces loyers impayés sont demeurées infructueuses, notamment le commandement de payer du 27 novembre 2018 ;
Que de surcroît elle a omis de payer les loyers des mois de novembre et de décembre 2018, ramenant ainsi la somme totale due à 10 350 000 Ar ;
Que par application de la loi sur les baux commerciaux, la requérante demande la résiliation du bail et l’expulsion de dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole des lieux loués. D’ailleurs, elle a entériné dans sa lettre du 7 novembre 2017 qu’elle quitterait les lieux en cas de loyers impayés ;
Que selon la jurisprudence, le congé n’est pas nécessaire si l’autre partie n’exécute pas ses obligations nées du contrat ;
Que d’importants préjudices moral et financier découlent de ces faits, outre le péril en la demeure due à l’ancienneté de la créance, le maintien de mauvaise foi sur la propriété d’autrui, d’où la demande d’exécution provisoire ;
Elle joint au dossier :
l Acte de décès de RAHANIRAKAMALALA Hermine ;
l Acte de notoriété ;
l Acte de décès de RAFALIMANANA Philippe ;
l Acte de notoriété de RAFALIMANANA Philippe ;
l Contrat de bail du 23 juin 2011 ;
l Certificat de situation juridique de la propriété dite FALIHERY ;
l Lettre dite « ENGAGEMENT » du 11 octobre 2018 ;
l Lettres de reconnaissance de dette du 12 février 2018, du 7 novembre 2017, du 2 janvier 2017 ;
l Sommations d’huissier en date du 12 et 16 novembre 2018, du 20 novembre 2018 ;
l Commandement de payer du 27 novembre 2018 ;
Par demande additionnelle, elle demande :
l D’ordonner l’ouverture des lieux en cas de fermeture du box loué en présence d’un huissier de justice qui dressera un inventaire des objets et effets immobiliers pouvant s’y trouver
l Autoriser le cas échéant la requérante à garder ces biens mobiliers dans un lieu qu’elle estime convenable à leur dépôt
En réponse, dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole fait valoir que dame RAFALIMANANA Zoelinivo n’est pas qualifiée pour introduire l’action p u i s q u e l e f i f a n e k e n a d u 2 3 j u i n 2 0 1 1 a é t é c o n c l u a v e c RAHANIRAKAMALALA Hermine ;
Que néanmoins, par sa bonne foi, elle s’est engagée dans différentes lettres à acquitter les loyers impayés ;
Qu’en cas de résiliation du contrat de bail, le bailleur doit payer au locataire évincé, une indemnité de transfert de son fonds de commerce ;
Que d’ailleurs, le bailleur n’a pas donné de congé commercial ;
Que la demande de dommages intérêts de la requérante est sans fondement, et ses agissements constituent une procédure abusive et vexatoire;
Par demande reconventionnelle, dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole demande une expertise contradictoire aux fins d’évaluation de l’indemnité de transfert de fonds de commerce que le bailleur doit payer préalablement à son départ des lieux, aux frais du bailleur ;
Elle joint au dossier :
l Fifanekena fampanofana trano du 23 juin 2011 ;
l Fanomezan-dalana ;
l Reconnaissance de dette et engagement ;
DISCUSSION :
En la forme :
Sur la recevabilité et la qualité pour agir :
Attendu certes, que le contrat de bail initial du 23 juin 2011 a été conclu entre feue RAHANIRAKAMALALA Hermine et dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole ;
Que seule propriétaire inscrite au titre de la propriété FALIHERY, TN°32 494 sur laquelle se trouvent les lieux loués par dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole, feue RAHANIRAKAMALALA Hermine a pour unique héritière, dame RAFALIMANANA Zoelinivo, d’après l’acte de notoriété n°326 du 18 décembre 2018 ;
Qu’en vertu de l’article 68 de la loi N° 68-012 du 4 juillet 1968 relative aux successions, testaments et donations, les biens formant succession du défunt sont transmis de plein droit aux héritiers ;
Que dame RAFALIMANANA Zoelinivo a donc bel et bien qualité pour agir sur le patrimoine qui lui revient de sa défunte mère ;
Attendu que l’assignation a été régulièrement introduite conformément aux dispositions de l’article 135 et suivant du Code de procédure civile ;
Attendu que la demande reconventionnelle ainsi que les demandes additionnelles ont été introduites conformément aux articles 351,352, 355 et 356 du Code de procédure civile,
Il y a lieu de déclarer recevables, l’assignation introductive d’instance, les demandes additionnelles ainsi que la demande reconventionnelle.
Au fond :
Sur les non paiements et les paiements irréguliers de loyers et la condamnation de dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole à payer la somme de 10 350 000 ariary représentant les arriérés de loyers échus jusqu’au mois de novembre 2018 outre les loyers à échoir jusqu’au départ définitif du box loué :
Attendu que dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole a toujours reconnu qu’il y a eu des arriérés de loyers impayés que ce soit dans les reconnaissances de dettes qu’elle a dûment signé, la sommation de payer par acte d’huissier des 12 et 16 novembre 2018 ;
Que même dans ses conclusions, elle a corroboré qu’il y avait bien des impayés d’un montant de 10 350 000 Ar et elle a réitéré sa volonté de rembourser cette créance ;
Que la mise en demeure préalable conforme aux dispositions de l’article 188 de la loi sur la Théorie Générale des obligations a été accomplie suivant actes d’huissier du 12, du 17 et du 27 novembre 2018 ;
Que les critères voulus par l’article 605 du Code de procédure civile sont remplies pour déclarer la créance certaine, liquide et exigible ;
Il y a lieu de constater les non paiements et les paiements irréguliers des loyers de dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole, de déclarer la créance de 10 350 000 Ar fondée, et condamner dame RAHARIMALALA Sabrina Hanitra Nicole au paiement de la somme de 10 350 000 ariary
représentant les arriérés de loyers échus jusqu’au mois de novembre 2018 outre les loyers à échoir jusqu’au départ définitif du box loué ;
Sur la résiliation du bail commercial liant les parties et la demande d’expulsion :
Attendu certes que dame Sabrina Hanitra Nicole a irrégulièrement payé ou omis de payer ses loyers ce qui constitue un manquement à ses obligations nées du contrat de bail liant les parties ;
Que cependant, l’article 43 de la loi 2015-037 sur le régime juridique des baux commerciaux dispose que « le bailleur qui entend poursuivre la résiliation du bail et l’expulsion du preneur dans lequel est exploité un fonds de commerce doit notifier par acte extrajudiciaire une mise en demeure d’avoir à respecter les clauses et conditions du bail ;
Cette mise en demeure doit reproduire, sous peine de nullité, les termes du présent article, et informer le preneur qu’à défaut de paiement ou de respect des clauses et conditions du bail dans un délai d’un mois, la résiliation est poursuivie ;
Qu’aucune des sommations d’huissier jointes au dossier ne reproduit cette disposition légale obligatoire ;
Que l’article 46 de la loi susvisée entérine que cette disposition de l’article 43 est d’ordre public ;
Qu’ainsi, dame RAFALIMANANA Zoelinivo ne peut procéder ni à la résiliation du bail commercial ni à l’expulsion du bailleur faute d’avoir accompli cette disposition d’ordre public prescrite par la loi ;
Sur la demande additionnelle d’ouverture des lieux et la demande d’indemnité d’éviction :
Il résulte de ce qui précède que ni la résiliation du contrat de bail, ni l’expulsion du locataire ne sont accordés ;
Le contrat du 23 juin 2011 n’est donc pas résilié ;
En conséquence, la demande d’ouverture des lieux et la demande d’indemnité d’éviction n’a alors pas d’objet ;
Sur les dommages-intérêts :
Attendu que l’article 43 du texte sus visé dispose que « A défaut de paiement du loyer …, le bailleur peut demander au tribunal de commerce la résiliation du bail et l’expulsion du preneur, sans préjudice d’éventuels dommages-intérêts » ;
Qu’il est aussi indéniable que le non-paiement de la créance de 10 350 000 Ar établie précédemment engendre préjudice au bailleur ;
Qu’en vertu de l’article Art. 193 de la loi sur la Théorie générale des obligations « En cas de retard dans l’exécution d’une obligation de payer une somme d’argent, le créancier a le droit d’exiger du débiteur, outre les intérêts moratoires, des dommages-intérêts compensatoires pour tout préjudice supplémentaire, même s’il résulte du seul retard » ;
Qu’il convient de faire droit à la demande de dommages-intérêts demandée mais le quantum demandé étant excessif, il y a lieu de le ramener à de proportions plus justes et ainsi fixer à 1 000 000 Ar ;
Sur la demande d’exécution provisoire :
Attendu que l’urgence et le péril en la demeure ne sont pas justifiés, il y a lieu de rejeter la demande d’exécution provisoire ;
P A R C E S M O T I F S
Statuant publiquement, contradictoirement à l’ égard de tous, en matière commerciale et en premier ressort :
Dit que dame RAFALIMANANA Zoelinivo a qualité pour agir ;
Reçoit l’assignation introductive d’instance, les demandes additionnelles ainsi que la demande reconventionnelle ;
Constate la défaillance de dame RAHARIMALALA Hanitra Sabrina Nicole dans l’exécution de ses obligations notamment le paiement irrégulier des loyers voire le non-paiement des loyers ;
Rejette la demande de résiliation du contrat de bail ainsi que la demande d’expulsion ;
Dit que la demande reconventionnelle d’indemnité d’éviction est sans objet ;
Dit que la demande additionnelle d’ouverture des lieux est sans objet ;
Condamne dame RAHARIMALALA Hanitra Sabrina Nicole au paiement de la somme de 10 350 000 Ar représentant les arriérés de loyers impayés ainsi qu’à 1 000 000 Ar à titre de dommages-intérêts ;
Rejette la demande d’exécution provisoire ;
Condamne les parties aux frais et dépens ;
Ainsi jugé et prononcé en audience publique, les jours, mois et an que dessus.
Et la minute du présent jugement a été signée par le PRESIDENT et le GREFFIER, après lecture.